Histoire du Bleu de Pastel
Le Pastel des teinturiers (Isatis tinctoria), appelé "guède" dans le nord de la France, est une plante dont on utilise les feuilles pour la teinture et les graines pour l'huile de pastel. Autrefois, les feuilles étaient broyées dans des moulins pastelliers, réduites en pate et moulées à la main en boules appelées "cocagnes".
Les boules de cocagne subissaient alors divers traitements assez longs et délicats (concassage, fermentation, séchage, ...) avant de donner du pigment utilisable pour la teinture.
L'art du maître pastellier consistait alors à utiliser ce pigment pour préparer sa cuve. C’était long et compliqué, mais la récompense était au bout lorsque le tissu sortait du bain encore jaune-vert et devenait bleu comme par magie au contact de l'air.
On obtenait avec le pastel toutes les nuances de bleu du plus clair
au plus foncé, il ne déteignait pas et conservait ses couleurs dans le temps... Le Pastel conserve aujourd'hui toutes ces qualités.
L'utilisation du pastel est connue depuis la préhistoire, les égyptiens l'ont utilisé également. Mais de l'antiquité romaine jusqu'au 16° siècle, c'est l'Europe occidentale qui en a tiré le plus grand profit ! Celtes et Gaulois utilisaient le pastel pour bleuir leurs tissus, se colorer les cheveux, mais aussi se couvrir le visage et le corps afin d'effrayer leurs ennemis. Faut-il voir là l'origine de l'expression "avoir une peur bleue" ?
Dans le monde médiéval européen le bleu n'est guère admis. C'est Saint Louis (Louis IX) qui imposera le bleu dans ses armes, couleur qui deviendra petit à petit l'emblème de la noblesse.
Les teinturiers ont alors besoin d'un colorant fiable et de valeur.
Or, dans toute l'Europe on cultive déjà le pastel, en particulier dans le sud qui produit, en quantité une teinture de très bonne qualité en raison de son climat.
C'est ainsi que pour des raisons climatiques, mais aussi peut-être à cause de la Guerre de Cent ans, un triangle Albi au Nord, Toulouse à l’Ouest, Carcassonne au Sud, deviendra la terre d'élection de la culture du pastel.
Au 14° siècle, du Lauragais, va partir le commerce du pastel qui fera prospérer la région jusqu'à l'arrivée de l'indigo au milieu du 16° siècle.
On parlera alors du "Pays de cocagne" dans cette région où le pastel est source d'enrichissement pour les marchands pastelliers établis à Albi et surtout à Toulouse.
La période la plus faste se situera dans les années 1450-1560 où le pastel fait figure "d'or bleu" et permet à de grands marchands comme Pierre d'Assézat à Toulouse de constituer des fortunes considérables, de construire des hôtels particuliers somptueux, d'accéder à la fonction de Capitoul et de s'ennoblir.
La culture et le commerce du pastel disparaitront progressivement d'Europe avec l'arrivée de l'indigo des Indes, moins cher et
plus facile à utiliser. D'autres causes sont aussi à l'origine de ce déclin comme les guerres de religion et le manque de motivation de marchands ennoblis…
Au milieu du 18° siècle, l'indigo a supplanté complètement le pastel. Sous Napoléon, en raison du blocus continental, le pastel renaîtra le temps de teindre les uniformes de l'armée napoléonienne. Ensuite, il retombera dans l'oubli jusqu'au 20° siècle...
A partir de 1994, le pastel a été remis en valeur par Denise et Henri Lambert, les fondateurs de l'entreprise Bleu de Lectoure.
La production actuelle, de pigment et d'huile, représente plus de 100 hectares de culture en Occitanie.
Les nouvelles applications industrielles de la plante, dont certaines connues depuis l'antiquité, sont nombreuses :
- Beaux-arts (encre, pastels, aquarelle, peinture, ...)
- Textile (teinture en plongée de tissus et de de bobines de fils pour les tisserands, haute couture, ...)
- Cosmétiques (huile de pastel riche en acides gras essentiels, pigment et extrait des feuilles)
- Peinture bâtiment, automobile et aéronautique, etc.
- Médecine (recherche,...)
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